samedi 24 octobre 2015

La maison silencieuse [Docteur Benway]

La maison se tenait là, devant lui, le dominant de toute son imposante stature, comme un gardien silencieux, endormi comme tous les gens normaux à cette heure avancée de la nuit. Les volets clos, le lierre qui avait envahi la quasi-totalité de la façade, formant comme un camouflage naturel sous lequel l’immense bâtisse se dissimulait, attendant que quelqu’un la réveille…
L’herbe était si haute désormais que les jardins ressemblaient à des champs en friches, à des jungles dangereuses, dans lesquelles çà et là on pouvait trouver de vieux objets, abandonnés par les anciens occupants ; on pouvait à peine entrevoir la balançoire, contre laquelle reposait encore un vélo abimé, rongé par la rouille.


5 ans. 5 longues années. C’était le temps qui s’était écoulé depuis sa dernière visite, et pourtant, si la nature avait repris des droits qu’elle ne possédait qu’à moitié, rien n’avait vraiment changé, ses souvenirs le guidait comme de très anciens réflexes qu’il retrouvait progressivement au contact de ce lieu si familier.
Theo crocheta la serrure de la lourde porte d’entrée infestée de toiles d’araignée, une meute de cloporte l’observa sans bouger, cachée dans les fissures de la pierre. Ses pas résonnèrent dans le vaste salon poussiéreux, se répercutant en écho semblables à la voix de quelques spectres émergeant de l’obscurité. Il avançait pas à pas, un pied devant l’autre, lentement, prudemment, non par peur mais mû par l’appréhension, par l’excitation, celle qui vous anime lorsque vous vous apprêtez à retrouver un proche perdu de vue pendant trop longtemps.
Tout était resté tel quel, dans la même disposition qu’avant l’incident. Les meubles, les canapés, n’avaient pas été recouverts et avait adopté la teinte grisâtre de la poussière accumulée durant tant d’années d’absences, comme les cendres d’un Pompéi domestique ; par endroits, on pouvait y voir les traces du passage d’oiseaux qui étaient parvenus à s’infiltrer à l’intérieur par la cheminée et qui avait élu domicile temporairement dans la maison. C’était les seuls êtres vivants à avoir pénétré ici en l’absence permanente des propriétaires, les animaux se fichent de savoir ce qui arrive aux êtres humains, nos affaires ne les intéressent pas.
Les assiettes du dernier repas étaient restées sur la table, les restes avaient moisis jusqu’à devenir une matière sombre et compacte, jusqu’à devenir un élément naturel du décor, une nature morte, une nature macabre. Les objets de valeurs n’avaient pas été volés, personne n’avait osé mettre les pieds ici ; on avait entendu des tas de rumeurs concernant ce lieu, des tas de mensonges concernant la tragédie, des tas de vérités probablement aussi. Personne n’avait tenté de s’introduire ici, les passants évitaient si possible la proximité de l’endroit lorsque la nuit était tombée, même les gens malhonnête était devenus superstitieux… Lui-même avait été tenté de revenir, il avait hésité, il s’était retrouvé de nombreuses fois devant le mur extérieur, puis il s’était ravisé, les souvenirs étaient trop douloureux, trop difficile à gérer, ils l’assaillaient comme un essaim, l’enveloppaient et lui faisait perdre pied, l’obligeant à se raccrocher au présent pour ne pas sombrer.
Puis il y avait eu l’évènement, cet orage, le plus violent et le plus impressionnant que le pays ait connu, la colère et le désespoir du ciel s’était abattu en une soirée, gonflant les eaux, arrachant les arbres… et c’est alors que tout a changé. Au début, ce ne fut que de simples rumeurs, des racontars de bistrots que les soulards ne colportaient qu’après avoir ingurgité plus de bières que leur organisme ne pouvait en supporter, des ragots que l’on partageait à voix basse de peur de passer pour plus fou qu’on ne l’était… puis les langues ont finies par se délier, d’autres faisaient état de phénomènes similaire : les morts étaient revenus. Des personnes, sans relations les unes avec les autres, prétendaient avoir revu leurs défunts, avoir conversé avec eux, les avoir touchés, le temps d’une nuit. Les témoignages s’étaient multipliés, même les sceptiques avaient fini par changer d’avis. Et puis il avait fait ce rêve, la nuit dernière.

Traversant les pièces de la maison silencieuse, il se souvint, de la première fois qu’il avait franchît le porche, de cette sensation confuse qui l’imprégna à jamais en entrant, ce mélange de paisibilité artificielle, de calme avant la tempête… Il se souvint d’un habitat chaleureux, accueillant, d’une famille heureuse, soudée, l’exact contraire de son quotidien, et pourtant, il eut l’étrange impression que quelque chose clochait, comme un élément à peine visible sur un tableau qui gâcherait l’ensemble de la toile, comme un petit détail insignifiant annonciateur d’un futur sombre mais sur lequel on ne parvient pas à mettre le doigt. Et il n’avait pu se défaire de cette désagréable sensation, qu’il éprouvait chaque fois qu’il venait, sans jamais comprendre d’où elle pouvait provenir. Parfois, lorsqu’il avait diné en leur compagnie, ils lui avaient donné l’impression d’être des marionnettes, des comédiens, qui tentaient de faire bonne figure, qui jouaient une pièce dans laquelle ils incarnaient une famille parfaite, le père, la mère et le fils, tous s’aimant d’un amour inconditionnel… le portrait semblait trop idyllique, trop forcé, mais il avait fini par s’y habituer.

Et il se retrouvait aujourd’hui, au cœur de tout, au milieu de ténèbres que tout le monde souhaitait oublier. Il était le seul éveillé alors que la ville dormait mais il n’était pas encore certain que tout cela n’était pas un mirage. Il naviguait en équilibre instable entre le rêve, la réalité et le cauchemar, ne sachant pas vers lequel des trois la balance pencherait.
Il s’approchait doucement de la porte menant à la véranda, presque sur la pointe des pieds, comme pour ne pas réveiller d’éventuels occupants qui dormiraient à l’étage.
Les souvenirs continuaient à affluer, un diaporama d’instants passés défilait dans sa mémoire, ceux d’une journée durant laquelle les rayons du soleil remplaçaient la pâle clarté de la pleine lune, leur chaleur se diffusant à travers les parois de cette cage de verre, ils étaient tous deux de l’autre côté, autour de la piscine, à l’endroit même où il l’attendait en ce moment.
Voir sa silhouette assise au bord de l’eau, patientant paisiblement comme s’ils s’étaient vus la veille, fut comme repasser un film en avance rapide, de leur rencontre simple et fortuite, qui avait évolué en une amitié de plus en plus solide, jusqu’ à cette soirée fatidique.
Theo faillit rester tétaniser par son apparition, son cœur s’arrêta l’espace d’un moment, il resta immobile pendant des minutes qui lui semblèrent des heures, les yeux rivés sur ce garçon qui n’avait pas changé depuis son départ, avec sa dégaine rassurante, sa décontraction qui contrastait tellement avec son état d’esprit à lui ; il eut envie de fuir, de rebrousser chemin, d’enterrer le passé une fois pour toute, mais il savait qu’il n’y parviendrait pas : une partie de lui était attiré, par l’inconnu, par le danger, par cette promesse de retrouver cette proximité perdu si brusquement et par des réponses dont la quête l’avait hanté jusqu’à aujourd’hui.

Une simple vitre les sépara encore pendant quelques instants, ses pieds avancèrent sans son accord, il marchait tel un somnambule, à peine conscient du monde qui l’entourait… sa concentration restait fixée sur un point précis, sur une personne, la seule à des kilomètres à la ronde, une ombre légère et gracile qui se découpait dans la nuit.
Au fur et à mesure qu’il se rapprochait, il pouvait entendre son cœur marteler sa poitrine, jouer une symphonie militaire qui rompait le silence de la maison vide, il sentait un champ magnétique se compresser entre eux deux.
Il posa le bout de ses doigts sur son épaule, comme pour vérifier s’il était bien réel.

- Louis…

Ce n’était qu’un murmure mais la puissance de celui-ci fit s’envoler quelques volatiles nocturnes qui épiaient la scène à travers les peupliers.

- J’étais pas sûr que tu viendrais.

Un sourire avenant et tranquille se dessinait sur son visage encore juvénile, le temps semblait ne pas avoir eu de prise sur lui.
Il ressemblait au garçon qu’il avait rencontré au détour d’un virage il y a des années, il portait ce vieux t-shirt usé qu’il affectionnait tant, un short maculé de boue, quelques ecchymoses au cou et sur les poignets…

- Pour être honnête, j’en étais pas sûr non plus.

Sa voix tremblait, contaminant ses membres et il tentait de se contenir, de ne pas montrer sa nervosité.

- Je pensais que tu serais parti, que tu aurais déménagé, comme les autres…

Les jambes de Louis faisaient des va et viens dans l’eau, créant des petites vaguelettes qui mourraient sur le rebord l’instant d’après : assis au bord de la piscine, seulement éclairé par la lumière de la lune, il ressemblait à un fantôme, ce qu’il était d’une certaine manière.

- Je suis parti, pendant quelques temps, mais j’ai compris qu’il y avait des choses auxquelles on ne pouvait pas échapper. Quoi que je fasse, tout me ramène ici.

Des silences plus ou moins longs complétaient chacune de leurs paroles, les silences propres à deux amis qui tentent de retrouver un semblant de naturel, un ersatz de normalité.

- Personne n’a repris la maison ?
- Non.

Theo aurait voulu en rajouter, il y avait tant de questions qu’il voulait lui poser, tant de choses qu’il voulait lui raconter… mais il se retint, craignant de tout gâcher, craignant qu’il ne disparaisse encore.

- Après ce qu’il s’est passé, je peux pas dire que je sois surpris.

Un silence un peu plus long, un peu plus pesant que les précédents, s’installa, une chape de béton sur un sujet que personne n’avait envie d’évoquer mais qui finirait tôt ou tard par être abordé. Louis plongea alors brusquement dans l’eau calme et stagnante qui reposait devant eux, resta pendant une bonne minute sous l’eau, avant de remonter bruyamment.

- Allez viens, qu’est-ce que t’attends ?

Theo hésita pendant une nanoseconde avant de le rejoindre, s’enfonçant dans l’eau un peu plus prudemment. Un frisson parcourut sa peau et remonta le long de son cou. Ils étaient souvent venus se réfugier dans la piscine, les après-midi d’été, y restant même parfois toute la nuit lorsqu’ils avaient la maison à eux seuls. Louis nageait, plongeait, sautait, savourait une vie retrouvée tandis que Theo se contentait de le regarder s’amuser, paralysé par l’étrangeté de la situation, par les réponses suspendues dans le temps.
Il avait la déconcertante sensation d’être extérieur à ce qui se déroulait sous ses yeux, comme si quelqu’un avait pris possession de son corps, le laissant passif, à observer à travers ses propres yeux… tout lui paraissait si irréel : il craignait qu’en faisant un geste trop brusque, il ne se réveille pour découvrir que tout ça n’était qu’une illusion.

- T’as pas changé, toujours aussi sage… allez, remue toi, je peux pas m’amuser tout seul !

C’est alors que la question s’échappa de la gorge qui la retenait prisonnière. Theo tenta de la retenir mais elle glissa entre ses doigts.

- Qu’est ce qui s’est passé cette nuit-là ? La nuit où t’es parti ?

Louis se figea l’espace d’un instant puis repris son manège aquatique.

- C’est donc ça qui te tracasse depuis tout à l’heure. Je pensais qu’on pourrait éviter les sujets qui fâchent. Tu te rappelles ce que je dis toujours : ne poses pas de questions dont tu n’aimeras pas les réponses…
- Ça fait 5 ans que je pose la même question dans le vide. Il ne se passe pas un seul jour sans que je remémore chaque putain de secondes de cette nuit, les sirènes de polices et des ambulances au beau milieu de la nuit, tous les voisins attroupés devant chez toi, tes parents morts, toi disparu et principal suspect… tous les jours je ressasse tous les détails dans ma tête, en essayant de me persuader qu’il y a une autre explication, que ça peut pas être vrai, que t’as pas pu faire ça. Dis-moi qu’ils ont tort ! Dis-moi que tout le monde se trompe !

Ce n’était plus vraiment lui qui s’exprimait, le passé remontait le long de son œsophage pour se déverser à travers sa bouche.

- Je ne sais pas ce qu’il s’est passé cette nuit-là, c’est… flou, comme un mauvais rêve. C’est arrivé si brusquement. Je me souviens seulement de quelques bribes. Je me souviens qu’on était à table, le ton est monté, très vite. Quelques secondes après, il y avait du sang partout, dans la pièce, sur mes vêtements… je me souviens pas les avoir frappés, j’étais en train de manger et la seconde d’après, j’étais debout au milieu du salon, à contempler l’horreur de ce que je venais de faire.

Theo restait figé, paralysé, devant la boite de Pandore qu’il avait ouvert. Face à lui, Louis récitait sa confession avec un détachement qui le mettait un peu mal à l’aise.

- C’était comme… une absence momentanée de raison, comme si pendant un temps très court quelqu’un avait pris possession de mon corps, de mon cerveau pour me libérer une fois le travail terminé…
- Et…ensuite ? demanda Theo, dans un effort qui lui parut surhumain.
- A ton avis. Tu crois que je suis resté à attendre qu’on découvre les corps ? Je suis parti, n’importe où, le plus loin possible, j’ai emprunté des petites routes, pour être sûr de rencontrer le moins de monde possible… et puis un mec m’a pris en auto-stop… j’ai pas réfléchi, j’étais paumé, je savais pas quoi faire, où aller, je suis monté… et ça se termine là…

Un autre genre de silence s’ensuivit, celui du deuil. Theo avait voulu des explications, il venait de réaliser que parfois l’horreur de l’imaginaire se concrétise dans la réalité.

- Je me souviens de tout, absolument tout, quand il m’a frappé, quand il m’a trainé au fond du bois, et le reste…

Les deux garçons se tenaient à quelques mètres l’un de l’autre, à chaque extrémité de la piscine, un univers les séparait. Pour la première fois, Louis semblait faillible, sur le point de craquer et de s’effondrer, pour la première fois depuis qu’ils se connaissaient.

- Pourquoi t’es pas venu ? Pourquoi t’es pas venu me voir, après avoir…fait ça ?

Louis poussa un petit rire nerveux.

- Pour te dire quoi : « Eh, salut, je viens de buter mes parents, tu viens avec moi ?» ? Soit pas totalement idiot. T’aurais fait quoi ?

Theo s’apprêtait à répondre « je t’aurais suivi, je serais parti avec toi » mais il savait que c’était faux, stupide et naïf. Louis s’extrait de la piscine, l’eau semblant glisser sur sa peau pâle et abimé.

- Il va pleuvoir, on ferait mieux de rentrer.

Il regarda son ami s’éloigner, disparaitre à l’intérieur de la maison, avalé par l’obscurité ; quelques gouttes commencèrent à tomber, bientôt rejointes par des milliers d’autres et le grondement du tonnerre, au loin, qui annonçait avec fracas sa venue. Il sortit de l’eau pour aller rapidement s’abriter.
Louis était monté dans sa chambre, elle aussi restée en l’état : le lit était défait, des papiers divers et des cd trainaient sur le bureau, les posters scotchés aux murs appartenaient à une autre vie, à un passé révolu. Un couple de chats errants s’enfuit lorsqu’ils pénétrèrent dans la pièce, les laissant seuls, avec le poids des souvenirs, avec des fantômes trop vieux pour être conjurés.

- J’ai l’impression d’être parti pour un trop long voyage… sauf qu’il n’y a personne pour m’accueillir.
- Je suis là.
- Tu sais de quoi je veux parler.

Louis frôlait du bout des doigts le moindre centimètre carré de la pièce, comme s’il cherchait l’emplacement caché d’un coffre, soulevant au passage des volutes de poussières.

- Après l’accident, tout le monde ne parlait que de ça, chacun avait ses propres théories, ses propres ragots concernant ta famille, tout le monde te désignait comme coupable, j’étais peut être le seul à ne pas vouloir y croire.
- Et maintenant que tu connais toute la vérité ?

Theo haussa les épaules.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé durant le temps pendant lequel t’es parti ? Je veux dire, où t’étais ?

Louis esquissa un sourire amusé, il s’attendait à cette question, il se demandait juste à quel moment il allait oser la poser.

- Tu veux savoir ce qu’il y a de l’autre côté ? T’es vivant, profites en et t’occupe pas du reste… je ne sais pas ce qu’il y a de « l’autre côté », je n’en garde aucun souvenir, juste un immense trou noir, jusqu’à mon retour ce soir. Je suppose que tout le monde ne parle que de ça.
- Rien n’est plus pareil depuis votre retour, les gens en parlent constamment, en bien comme en mal, certains espèrent, d’autres ont peur. A chaque orage, ils se demandent si les choses vont recommencer ; Personne ne peut expliquer ça.
- Y’a-t-il vraiment besoin d’explication ? Les morts sont revenus, peu importe pourquoi ou comment, on est revenus, ça devrait leur suffire. Parfois, il n’y a pas de raison, pas d’explication : les gens attendent trop. Nous ne sommes la preuve de rien, si ce n’est que la mort n’est peut-être pas un état définitif… et encore, rien ne dit que nous ne sommes pas une gigantesque hallucination collective. Mais nous ne sommes pas la preuve de l’existence d’un quelconque au-delà, du Paradis ou de l’Enfer, ni même d’un quelconque Dieu. Si tu veux mon avis, tout ça est une grosse farce, la plus grosse blague qu’on puisse faire. Quelque chose à dérapé ou quelqu’un a fait une erreur et nous sommes revenus, et lorsque tout sera réparé, tout ça s’arrêtera du jour au lendemain…ou pas. Ou bien nous allons tous revenir pour de bon. Je n’en sais pas plus que toi.

Theo cru remarquer un léger frisson, un léger tremblement à la commissure de ses lèvres, ses doigts qui refusaient de tenir en place, comme lorsqu’il refusait de dire la vérité… ou peut-être n’était-ce rien. Louis se rapprocha de lui, mit ses deux mains sur ses épaules, et plongea son regard glacé dans le sien.

- La vérité c’est que tout cela n’a pas vraiment d’importance, je n’ai pas envie de parler de ça. La nuit de durera pas éternellement, profitons en tant qu’il est encore temps.

Ce qui se passa durant le reste de cette nuit est un secret d’alcôve, que la maison garde jalousement entre ses murs. Ce fût une fête, une célébration, des retrouvailles, deux enfants qui vécurent cette nuit comme si c’était la dernière, comme si le monde allait s’effondrer dans quelques heures. Rien d’autre n’avait d’importance, ils étaient seuls au monde, dans cette maison muette, au moins jusqu’au lever du jour. Les frontières étaient abolies.
Puis ils s’endormirent côte à côte, épuisés.

Theo ouvrit un œil pour entrevoir les premiers rayons du soleil qui tentaient déjà de pénétrer à l’intérieur. Il ouvrit le second pour s’apercevoir qu’il était seul, Louis était parti, comme s’il n’avait jamais été là, comme s’il avait imaginé toute cette nuit.
Certes, il savait à quoi s’attendre, il savait qu’une fois le jour levé, il aurait disparu, mais il avait espéré, que les choses soit différentes.
Il se leva, très lentement et quitta la maison, à regret. Il referma la porte derrière lui, qui claqua dans le matin calme, pendant qu’au loin l’aube grignotait la nuit. Il s’enfonça à nouveau dans le jardin en friche pour regagner le mur d’enceinte par lequel il était venu, jeta un dernier regard à l’immense demeure, avant de rejoindre le monde civilisé, dans l’espoir qu’à la prochaine pleine lune, il serait là, à nouveau.


LA MAISON SILENCIEUSE

(Prologue à « Ghost Days »)

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